~qui échappe à l'âge d'être une femme (male gaze)
« Homme, mon ami, viens respirer ensemble ? … J’ai toujours aimé ta compagnie. Tu me regardes à présent d'un œil si doux. Tu regardes émerger, d'un confus amas de défroques féminines, alourdie encore comme d’algues une naufragée, - si la tête est sauve, le reste se débat, son salut n'est pas sûr - tu regardes émerger ta sœur, ton compère : une femme qui échappe à l'âge d'être une femme. Elle a, à ton image, l'encolure assez épaisse, une force corporelle d'où la grâce à mesure se retire, et l'autorité qui te montre que tu ne peux plus la désespérer, sinon purement. Restons ensemble : tu n'as plus de raisons, maintenant, de me quitter pour toujours.
Une des grandes banalités de l'existence, l'amour, se retire de la mienne. »
Colette, La naissance du jour, Flammarion, page 34
La ~ sauvage
« Le mot sauvage n’est donc pas utilisé ici en son sens moderne, péjoratif, d’ « échapper à tout contrôle », mais en son sens originel de « vivre une vie naturelle », une vie où la criatura, la créature, a une intégrité foncière et des limites saines. Les mots femme et sauvage créent une métaphore qui décrit la force fondatrice de l’espèce féminine. Ils personnifient cette force sans laquelle les femmes ne peuvent vivre. »
Clarissa Pinkola Estés, Femmes qui courent avec les loups, Histoires et mythes de l’archétype de la Femme sauvage, livre de poche, page 22
Une foule d'images de ~(s)
"Et auprès d’eux se tiennent des femmes qui, elles aussi, ont la peau de toutes les couleurs ; certaines au crâne chauve et d’autres à la longue chevelure flottante ; des femmes dont les seins pendent très bas ou ont été assez étirés pour être rejetés par-dessus l’épaule et d’autres avec de petits seins hauts placés comme ceux des statues qui ornent les tombeaux des Médicis à Florence ; des femmes qui font bruisser leur pagne au gré de leur démarche et d’autres qui s’en servent comme si c’étaient des plaques de tôle destinées à protéger leur vertu ; des femmes qui ont l’air d’avoir les bras vides lorsqu’elles ne tiennent pas d’enfants et d’autres qui les portent à bout de bras comme de petits chats sauvages ; des femmes plus disposées à se battre que leurs maris et d’autres qui se dispersent comme des feuilles au moindre bruit de querelle ; des femmes dont les mains ne sont jamais en repos et d’autres qui restent assises après une journée de labeur, les mains posées sur les genoux. "
L’un et l’autre sexe, Margaret Mead, page 59-60
~ ordinaire, ou garder son âme d'enfant, à la différence des gens ordinaires
« La raison pour laquelle Donna Amalia n’engraissait pas trop était que,
au fond d’elle-même, continuait de brûler, sans jamais se consumer, cette ferveur qu’une femme ordinaire peut connaitre quand elle est enfant, mais qui se réfrène ensuite dans sa jeunesse, et
disparait à l’âge adulte. Les sentiments, les pensées de Donna Amalia, étaient toujours en mouvement, toujours ardents ; et ils ne s’apaisaient pas même dans le sommeil, car son repos était un
tel spectacle de songes, qu’à les raconter, on les aurait pris pour les Mille et une Nuits.
Le secret du caractère de Donna Amalia résidait tout entier en ceci : à la différence des gens ordinaires, elle n’acquérait jamais, à l’égard des aspects, même les plus coutumiers, de la vie,
cette habitude dont naissent l’indifférence et l’ennui. »
Elsa Morante, Donna Amalia et autres nouvelles, folio, pages 12-13